“La littérature et les bandes dessinées pour les filles sont monnaie courante.”
Ah bon ?! Mais… Quel.le.s auteur.e.s ont revendiqué cela ?
Nous a-t-on demandé, à nous les auteur.e.s, si nous consacrions notre travail à certaines personnes sur base de leur sexe biologique ou de leur genre ?
La citation choisie provient d’une récente chronique de bande dessinée dans Glam Attitude. Bien que ce soit un magazine adulte, et que l’article soit consacré à une bande dessinée adulte, la journaliste choisit d’infantiliser tout le monde d’entrée de jeu. Bandes dessinées pour les filles.
S’il s’agissait d’un cas isolé, on en rirait presque. Malheureusement nos années passées à promouvoir notre travail nous laissent penser qu’un pacte a été signé entre certains éditeurs, libraires et journalistes pour définir notre style narratif selon les stéréotypes de genre les plus réducteurs. Allez savoir ce que ça leur rapporte mais nous, nous en avons bien marre !
Tout aussi récemment que Glam Attitude, le magazine Femina avait publié un article intitulé “5 bd de filles pour filles“, titre à couper le souffle ! Pourtant le contenu de cet article laissait transparaître que la journaliste considérait les ouvrages chroniqués de qualité en dehors de toute considération de genre, et de nature à pouvoir toucher tous les publics. Bien qu’une des autrices impliquées leur ait demandé de changer le titre, et que des internautes aient laissé des commentaires en fin d’article pour leur suggérer la même chose, faisant part de leur indignation, Femina a refusé. Nous leur avons alors écrit, en tant que collectif, pour leur signifier les enjeux qu’un tel titre représente, leur demandant à notre tour de simplement le changer, et – peut-être !- de lire notre charte.
Au lieu de nous répondre Femina a pris une autre décision : supprimer tout l’article. Plutôt que de cesser d’infantiliser des autrices, ils ont préféré ne pas les chroniquer du tout !
Dans notre charte nous évoquons les dangers des différenciations et hiérarchisations stéréotypées. Prétendre qu’une autrice soit une fille qui fasse de la BD pour filles est non seulement infantilisant mais persiste également à véhiculer l’idée que ce qu’écrivent ces autrices ne pourrait pas intéresser des hommes, ce qui est faux. Ce que les gens aiment lire n’a pas besoin d’être rabaissé à une binarité arbitraire des genres et des sexes. Le pouvoir des médias est central dans la perpétuation de clichés sexistes, et c’est justement par le biais des journalistes que nous pouvons espérer faire avancer les choses !
Cher.e.s journalistes, soyez du bon côté de l’Histoire !